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Extraits de l'interview de Serge Letchimi



Serge Letchimi est urbaniste de formation, il occupe actuellement le poste de maire de Fort-de-France, capitale de la Martinique

 


Q : En tant qu’urbaniste, pouvez-vous nous dire quels sont les problèmes particuliers rencontrés dans les villes martiniquaises, et tout particulièrement Fort-de-France ?


 

R : Il existe des problèmes particuliers inhérents aux villes de la Martinique. Ces difficultés sont liées à l’augmentation spectaculaire de la périphérie des villes. L’urbanisation forte lors de la deuxième moitié du XXième siècle a créée une. ville à double vitesse (pauvres/riches). Comment faire pour que la ville spontanée devienne ville de nécessité, de droit ? Il est impératif de rendre les quartiers plus sains ( ex : Texaco, Volga Plage...). Reste à financer ces assainissements. D’autre part, un paradoxe demeure : les personnes des quartiers pauvres sont bien souvent non propriétaires des terrains. Cette non reconnaissance crée de véritables problèmes. Dans le quartier Trenelle-Citron, par exemple, vivent 2000 familles, soit plus de 7000 personnes dont très peu sont propriétaires du terrain occupé.  D’où un incontestable besoin de régulation. Ces terres appartiennent à la ville, à l’Etat ou sont parfois des propriétés privées, ce qui rend les choses d’autant plus complexes. La question de la terre et de sa répartition est un problème essentiel encore aujourd’hui. Un problème que nous devrions régler pour aller au bout de l’abolition de l’esclavage. L’injustice entre les békés, propriétaires fonciers, et les nègres a été continue jusqu’à aujourd’hui. En 1967, il y eu pourtant une tentative de réforme foncière. On note pourtant que la population martiniquaise ne remet pas en cause la suprématie foncière des békés. Tout cela est considéré comme acquis.

 


Q : En quelques mots, quelle évolution statutaire prônez-vous pour la Martinique et pourquoi ?


 

R : L’appartenance à la France nous a plongé dans le cycle infernal de l’assistanat et de la recherche perpétuelle du profit. Nous avons basculé dans une société mécaniquement consommatrice. Dans les faits, nous sommes européens malgré nous. Au niveau économique, cette appartenance pose certains problèmes. L’absence de protectionnisme pour la production locale ne permet pas le développement d’une industrie forte. Un minimum de protectionnisme est pourtant indispensable pour le développement local. Concrètement, le financement européen et ses retombées économiques ne sont pas si importantes. En fait, j’aurai préféré avoir un aéroport moins luxueux, cela n’aurait rien changé pour nous. Les martiniquais constituent un peuple. La France a intérêt à avoir des régions plus fortes et reconnues. Nous sommes dans une phase de conquêtes des libertés locales. L’indépendance ? Elle aurait du se faire dans les années d’après-guerre. Il est maintenant trop tard car une sécession provoquerait aujourd’hui un bouleversement trop fort, notamment sur le plan social. Cela dit, les exemples de l’Italie et de l’Espagne, pays fortement décentralisés, nous montre que l’on peut être Nation dans une autre Nation. Cette position revient à un certain pragmatisme ; mais la véritable autonomie correspond à une forme d’indépendance. L’indépendance la plus totale est l’indépendance de l’homme.

 


Q : Quelle doit être pour vous la place du créole en Martinique ?


 

R : Le mouvement de la créolité m’apparaît comme trop étroit, il manque d’universalisme. La dimension la plus importante est celle du développement. Le défi n’est pas culturaliste, mais concerne le développement. La créolité passe par notre capacité à gérer le développement. Il est cependant nécessaire d’accentuer la place du créole, car si une langue meurt, le peuple rattaché à celle-ci meurt aussi. Le créole est un vecteur essentiel de notre identité.

 


Q : Quel est l’avenir du secteur agricole martiniquais ?


 

R : La stratégie de non culture est visiblement décidée par le préfet. Nous devons pourtant organiser la production locale, et non pas laisser la terre en friche et se contenter d’importer, comme nous le faisons aujourd’hui. Le problème est que tous les circuits sont maîtrisés par les propriétaires fonciers békés. Le même schéma historique se perpétue : les nègres n’accèdent pas au pouvoir économique.